Les faux-monnayeurs - André Gide

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Texte 1 - L'incipit

Support "C'est le moment de croire [...] remise à l'heure" Partie 1, Chapitre 1.


Dans cette scène liminaire, l'un des héros des f-m, Bernard Profitendieu, découvre au travers d'une lettre dérobée le secret de sa naissance : Il est le fruit d'une union adultère. La découverte de sa batardise va le décider à fuguer.


 {1-14} Présentation de Bernard et de sa famille

{14-28} Découverte de la lettre et indifference de B
{28-fin} Bernard enterre son passé.


➜  Volonté de s'émanciper, de se libérer du carcan (prison) familial. Une scène transgressive (brave l'interdit : début de l'émancipation).
Incipit "In medias res" (cad que l'on entre tout de suite dans le feu de l'action). Motifs propres à l'incipit, en l'occurence « fenêtre ouverte ».

Mais en quoi Bernard est-il représentatif du roman d'apprentissage ?
En quoi cet incipit est-il un programme de l'ensemble du livre ?

Lecture linéaire (utiisée pour les khôlles) :

Citations et relevés
Analyses techniques
Interpretations
« C'est le moment de croire... »
Indice temporel, discours direct
Attente, suspense. In medias res.
« Il releva la tête et leva l'oreille »
Connotation
Narrateur omniscient. Vigilance et transgression.
« Mais non »
Discours indirect libre
Déception de l'attente du lecteur
« Sa mère, sa sœur... »
Énumération familiale
Hiérarchie selon l'âge. Où est sa place ?
« Palais, concert, pension »
Lexique et antithèses liberté/prison
Milieu bourgeois et opposition liberté/enfermement
« potasser son bachôt »
Voc familier, discours indirect libre
Alternance entre discours direct, direct libre et narratif
« bachôt »
Connotation
Bac = franchir un seuil (volonté de s'émanciper)
« famille » « démon »
Antithèse : Convention/Transgression
Connotations de "démon" :
Bernard : Désir d'émancipation mais risque de "basculer" . Sens philosophique : Démon de Socrate
Sens religieux : Voix de la conscience
Sens psychoanalitique : Pulsions/Subconscient
Lignes 9 à 13
Motif de l'incipit : "fenêtre ouverte"
>< Champ lexical de la chaleur
Appel à l'évasion/à la fuite
>< Sensation d'oppression
« eut mis bas »
Connotation : Accouchement
Bernard doit se faire par lui-même. "Self made man"
« Ça joue la larme »
Style de la maxime
Il commente la lettre en dévalorisant l'aspect sentimentaliste de la lettre d'amour et ses stéréotypes.
« Oui, la date était peremptoire »
Discours indirect libre
Parataxe rapide.
Détachement d'émotivité.
« interroger »
Interrogatoire, connotation :
Topos du policier. Dramatisation de l'indentité de son père.
Horizon de lecture déceptif...
« sied/bon goût/prince »
Lexique des convenances >< « croquant »
Critique des valeurs bourgeoises. Bernard est un héros piccaresque qui fait sa rebellion.
« ne retenons/n'approfondissons »
Impératif
Il s'impose à lui-même ses propres règles. Autonomie : Pas vers l'âge adulte.
« replia/attachait/coffret/recouvrir/retomber/replaça »
Lexique de l'enfermement
Il renie son passé et plie bagage.
« Il remit la liasse dans le coffret et le coffrer dans le tiroir »
Chiasme (figure de style)
Emboîtement. Structure du roman qui fonctionne par enchainement.
« doucement/précautionneusement »
Adverbe montrant la prudence
Transgression d'un interdit.
« recouvrir une lourd plaque d'onyx »
Connotation
Cacher quelque chose, enterrer son passé.
« l'ecombrante pendule qu'il venait de s'amuser à réparer »
Aspect ludique.
Démontre que la découverte de la lettre est dûe au hasard.


24/01 : Kholle. Partie 1 Chapitre VI. « Dans un instant [...] qu'il vole » p.61-62 by Maeva et Matthias



Texte 2 - La figure de l'écrivain

Partie 1 - Chapitre VIII « Édouard contrôle [...] imagination du lecteur » p.78-79

Au chapitre III, Olivier Molinier a parlé de son oncle Edouard (à Bernard), romancier, qui doit arriver à Paris dans la matinée. Or nous sommes au chapitre VIII ce qui indique une forte dramatisation de l'apparition du personnage. Dans le train, ce dernier relit la lettre de Laura ainsi que son propre journal intime. En cela, il figurerait un double du lecteur.

Edouard est un personnage pris dans l'intrigue. Il y a des mélanges entre narration et journal. C'est un texte argumentatif et théorique sur l'idéal du roman.

Comment la figure de cet écrivain de fiction peut-elle réveler les motivations esthétiques du roman "Les faux-monnayeurs" ?

Citations
Analyses
Interpretations
« somnole/sensiblement »
Connotation du rêve et de la réalité
Quelle frontière entre réel et fiction ?
« Il se demande/il se dit »
Verbes pronominaux
Introspection du personnage
« qu'elle a les cheveux noirs »
Aspect physique décrit.
Détachement d'Edouard avec l'intrigue. Il se transforme en critique littéraire, c'est un esthéte.
« description trop exacte » « ils devraient »
Vb modalisateurs. Obligations
Discours théoriques qui décrochent de la narration. E utilise un ton assertif et dogmatique qui rejete une ésthétique réaliste au profit de la libération de l'imagination.
« Roman les faux monnayeurs »
Mise en abyme
×
« sujet/pas encore écrit une ligne »
Champ lexical de l'écriture
Indice d'un regard ironique de Gide par rapport à Edouard. Annonce d'un échec esthétique.
« il transcrit sur un carnet ses notes et ses réflexions »
Répétition du mot "carnet"
Effet miroir et présent de narration. Cependant quelque chose est sauvé : C'est l'écriture par fragment du journal intime qui constitue la génèse du Roman. Mise en abyme de l'œuvre qui se fait en direct, sous les yeux du lecteur « The work in progress »
« dépouiller/débarasser/pureté »
Lexique de l'épuration
Gide est le précurseur du Nouveau Roman.
« Il ne me paraît pas/ non plus que/qu'on ne vienne point/n'avous nous pas »
Multiplication des phrases négatives.
Définition du Roman par la négative. Rejet du Balzac, idéal impossible à atteindre. Les excès d'Edouard confinent au comique et peut être y a-t-il une ironie de Gide par rapport à cette épuration totale.
« Non plus qui ne fait le drâme/gêné au théâtre par l'acteur »
Comparaison à valeur ironique
Analogie absurde et ironie.


T3 - La critique de la psychanalyse

Support Partie II - Chapitre 5 « Sophroniska m'a reparlé de Boris [...] comme à un dernier refuge. »

L'extrait se situe après l'arrivée d'Edouard chez Sophroniska.

1§ Le pêché de Boris
2§ Confiance en une guérison proche

-> Comment Gide par le renversement de ce tabou parvient-il à critiquer le discours psychanalytique ?

Citations
Analyses
Interpretations
« croit-elle »
Verbe modalisateur
S est persuadée de tout savoir à propos de Boris.
« étale »
Verbe, connote :
Dévoiler, présenter : Eclaircir.
« Rouages démontés/ horloges/pendule »
Champ lexical de la machine, métaphore filée de la mécanique.
S traite B comme un objet, il est réifié. Vision scientiste de l'art psychanalytique qui se perçoit comme quelque chose de minutieux
« confesser »
Champ lexical de la religion
L'enfant est culpabilisé. Confusion discours scientifique/religieux.
« Soproniska »
Onomastique
Vient du grec Sophron. Onomastique soulignant le pédantisme : Ironie de Gide.
« taillis/débusqué/touffe/abriter »
Champ lexical de la chasse
On associe Boris à un animal traqué. Le discours se révèle violent.
« pauvre enfant »
Registre pathétique
Vient s'opposer à la violence ci-dessus soulignée.
« sonner à l'heure »
Connotation
Déshumanisation, conformisme
« C'est à y perdre son Latin »
Connotation/Ironie
Gide se moque du pédantisme.
« a été mis »
Tournure passive
Souligne l'impuissance, la soumission de Boris.
« Baptistin »
Paranomase
Fait penser au baptème, religion. Le baptème était une étape de la vie, un sueil à franchir. Thème du roman d'apprentissage : Le jeune garçon traverse une expérience.
« plaisir/bondait/s'extasiait »
Champ lexical du plaisir
Périphrase de l'onanisme
« magie/mystérieusement/secret »
Connotation
Ésotérisme du langage des enfants >< Volonté du décryptage du discours scientifique = Echec de la communication.
« merveilles »
Connotation religieuse
Vision païenne (paganisme).
Lignes 22 à 27
Dialogue rapporté, enchâssement du récit
Boris -> S -> Edouard -> Lecteur
On n'entend donc à aucun moment la "voix" de Boris.
« qu'elle me rapportât/prétend »
Subjonctif passé. Modalisation importante.
Gros degré d'incertitude : soupçons. Par le chaminement successif et polyphoniques des paroles, Edouard jette le discrédit sur le discours de S.
« j'ai trouvé l'explication/je cherchais/par chemin/gaz teléphone 100 000 roubles »
Démarche scientifique
L'odre moral est vécu comme une contrainte et s'oppose à la volonté d'émancipation de Boris. Violence de la cure. Esotérisme, violence moralisatrice.


T4 - Deux lettres en miroir

ø Première lettre : Partie II, Chapitre 1 : Oliver "type épatant"
ø Deuxième lettre : Partie II, Chapitre 6 : Bernard "spirituel"


1°) Situez ces deux lettres dans l'économie du roman. Observez les effets de parallélismes et d'opposition.

2°) Quel sentiment transparaît dans la lettre d'Oliver ? Qu'est-ce qui le provoque dans la lettre de Bernard ?

3°) Dans la lettre de Bernard, comment sont présentés les confidences ?
 Que révèlent-elles sur le personnage ?
 Est-ce la même démarche dans celles d'Oliver ?

4°) Pour Gide, le langage est-il apte à dire la vérité des sentiments ?


Texte 5 - Le suicide de Boris

Support - Partie III - Chapitre 18
« Encore 5min [...] tout s'effondra »

S1. Nous somme au dénouement du roman. Avec la mort de Boris qui constiture un paroxysme, une acnée de la narration.
 En effet, ce denier, après avoir été intronisé dans "la confrérie des hommes forts" se voit imposer une épreuve initiatique : il devait brandir l'arme de son grand mère et tirer.

S2. Mvts du texte : {1-98} : La dramatisation de l'acte fatal. Fuite de Phiphi et prolepse narrative.
{19-fin} La marche tragique de Boris vers la mort.
Tonalité : Tragique, évenements s'enchainant de façon fatale.

Problématique : En quoi la mort tragique de Boris constitue-t-elle un échec de l'initiation ?

I - La dramatisation du récit

1.1 - La variation rythmique de la narration

-Une scène narratif, un enchainement d'actions rapides
-Emploi de passés simples "leva/claqua/s'élança"
-Connecteurs temporals : « puis/presque aussitôt/encore 5 minutes »
-La prolepse narrative : « raconta plus tard/se le reprocher par la suite/disait-il plus tard »
-Iréel du passé : « Il l'aurait surement empêché »
 Utilisation de l'imparfait :  « Il marchait/était/formait/pouvait » Suspension de l'action, du temps.
-Retour à une scène narrative, accélération de l'action : « se pencha/reconnut/partit »

1.2 - Une vision de la scène trompée

-Un observateur s'en va
-Gontra Passavant : « cessa presque aussitôt de regarder et se replongea dans son travail.
-La Pérousse ne voit pas la totalité de la scène : géré par la chaire
Le lecteur suit des témoins potentiels mais dont le regard est gêné ou impossible.

1.3 - Théâtralisation de la scène

-Le décor ou l'organisation spatiale est mis en valeur « emplacement prévu/place marquée/contre la porte condamnée/retrait »
-Accessoires et costumes « pistolet/vareuse »
-Entrée en scène d'un comédie « comme un automate/comme un somnambule/affreusement pâle »
La Pérouse « de sa voix la plus forte/tachait de faire ». La mort de Boris senble répondre à une véritable mise en scène où rien n'a été au hasard pour l'éxécution de la tragédie.

II - Un épisode tragique

1 - La fatalité

En effet, les personnages semble avoir perdu le contrôle de leurs actes. Ils sont le jouet de la fatalité.
-> Comparaison de Boris avec un automate/somnambule.
La Pérouse n'arrive plus à agir « il resta figé/paralytique »
Voix du destin « encore 5 minutes » Indétermination de l'origine de la voix : Destin ?

2 - Double temporalité

-Le déroulement chronologique de l'action. Le spectateur sait déjà qu'il va mourir.
Les prolepses indiquent au lecteur le côté irréfutable du dénouement : « pâle/automate/porte condamnée »
Comme dans les tragédies classiques, le lecteur ou le spectateur sait que le personnage se dirige inévitablement vers la mort.
Dans l'Antiquité et selon Aristote, le spectacle d'une bonne tragédie doit provoquer chez le spectateur le catarsis.
Cette dernière repose sur deux sentiments fondamentaux :

2.3 - Le Catharsis "Terreur et Pitié"

La chute de Philipe : « sentit un grand froid/le sang se figeait dans ses veines/un grand tremblement »
Gontran ressent de la compassion : « En pleurant »

III - La valeur symbolique de l'épisode

3.1 - L'intrusion du réel dans l'aventure

-Inspiration d'un fait divers : Journal de Rouen, 5/06/09
-La divergence entre les "faux monnayeurs" de Gide et les fm d'Edouard qui refuse de l'intégrer : « Ils ont quelque chose d'indéniable, de brutal, d'outrageusement réel »
-En acceptant de prendre le risque de la réalité, Gide suggère peur-être que l'ensemble du récit n'est au contraire que fiction -> Thème de la fausseté...

3.2 - L'échec de l'imitation

-Le suicide de Boris peut être assimilé à un suicide du texte. En effet, une des pistes narratives développées dans le roman est celle du roman d'initiation.
Boris semble échouer et traduit l'abandon de la piste policière.

3.3 - L'intrusion métaphorique de la mort de Boris

Cet épisode est à mettre en relation avec le titre. Boris traduit les passages de fausse amitié.

C O N C L U S I O N

En cela, Gide met le lecteur en garde contre le leurre des fausses valeurs dont on peut être victime.

A X E
D' E N S E M B L E
N°1

I - Un roman classique

« Rien n'est plus difficile à observer que les êtres en formations » La trame du roman d'apprentissage.
-Une perte des origines : Marthe Robert : « Complexe du batard » et complexe de « L'enfant trouvé »
Le personnage, qui découvre ou rejette sa naissance, s'impose la necessite de se recréer par lui-même. Et ce moment lance la quête identitaire qui permet au roman de se faire.
-Des personnages en errance : Berrnard le piccaro, Olivier qui accompagne Passavant en Corse. Laura envoyée en cure à Pau et s'enfuit en Suisse. Vincent et Lady Griffith s'en vont à Monaco... etc
-Associations binaires d'initiation : Une relation maître à élève : Boris et Baptistin, Edouard et Bernard. Valorisation de l'amitié virile qui est peut être un rapped de l'idéal antique grec d'initiation.
Bernard rentre chez lui et gagne en autonomie.

1.2 - Un Roman bourgeois

La satire du faux semblant.
p328 : Discours de Molinier. Critique du pouvoir de l'argent. Critique du pouvoir puritain.

1.3 - Un roman réaliste

-Insertion de multiples lettres
-Inspiration d'un fait divers : Suicide. Voir texte le traitant.

II - Un roman résolument moderne

2.1 - Un refus du réalisme

-Voir texte n°2 : La figure de l'écrivain (dépuiller le roman... etc.)
-Idéal classique, qui va vers l'épuration et l'abstraction "mon cerveau chavirait vite vers l'abstrait".
-Ce refus du réalisme : « Appel à l'imgination des lecteurs »

2.2 - Un roman polyphonique

-Kaléidoscopique/mosaïque
-Toutes les lettres mélangées avec le Journal Intime et de la narration.
-Entremêlement des discours : Indirect, Indirect libre.
-Circulation des points de vue : Journal Intime volé par Bernard ...
-Intertextualité : Le fait d'écrire un texte qui renvoie à un autre.
-Multiplication des épigraphes qui vont orienter la lecture des chapitres.

-> Les Faux Monnayeurs offrent toujours une approche biaisée : C'est au lecteur de recomposer le sens de l'œuvre. Car Gide semble refuse d'être un référent absolu. La vérité apparaît toujours masquée et fuyante : contruite par une multiplicité de voix. En ce sens, le statut du guidage par l'Auteur est fortement entamé. Le statut de Gide n'assume pas du tout ce rôle.

2.3 - Un manifeste littéraire pour un roman idéal

Manifeste littéraire = Texte théorique qui permet une série de règles propres à un mouvement littéraire.
-Mise en scène des cercles littéraires de l'avant-garde. Ce idéal connaîtra certains échecs (le roman D'Edouard qui ne verra jamais le jour) et on a une critique sévère d'une forme avant gardiste à travers les compromissions des personnages comme Passavant.

III - La poétique du roman

« Rien n'a pour moi plus d'importance que poétique [...] Il me semble parfois que je n'existe pas vraiment » Partie I, VIII.

3.1 - « A Work In Progress »

-Texte 2 : La mise en abyme avec le roman "Les faux monnayeurs". Intertextualité avec le journal intime. Le roman s'écrit sous nos yeux.

-L'auteur qui juge ses personages et se plaint de son roman :
« Passavant [...] autant n'en pas parler n'est-ce pas ? »
Ludy : « De telles personnages sont taillés dans des étoffes sans épaisseurs »
« Si jamais il m'arrive d'inventer jamais une histoire, je ne la laisserai plus habiter que par des caractères trempés que la vie loin d'émousser, aiguise. »

3.2 - Un discours métatextuel omniprésent

-Mise en abyme : Les effets : Double titre, double écrivain, double journal.
-Personnages qui se font plus commentateurs que actants.